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La nutrition des levures
La nutrition des levures
Publiée le 20/01/2014 14:19
Conseils oenologique Microbiologie

La levure la mieux connue, Saccharomyces cerevisiae, doit trouver dans le moût l’ensemble des nutriments essentiels à son bon développement : sucres, azote, sels minéraux et vitamines. Cependant, différents paramètres conduisent à une grande variabilité de la composition des moûts et un ajustement est parfois nécessaire.

1 - Nutrition levurienne et moûts carencés

 Que consomment les levures ?

  • Les sucres : glucose et fructose servent de source de carbone, nécessaire à la production d’énergie. Leur dégradation conduit à la production d’alcool, déchet rejeté par la levure.
  • L’azote, indispensable à la synthèse des protéines de la levure, est présent sous différentes formes :

        - minérale (ou inorganique) : ion ammonium (NH4+) aussi appelé sel d’ammonium ou azote ammoniacal,

        - organique : acides aminés, peptides (petits enchaînements d’acides aminés) et protéines (longues chaines d’acides aminés).

    Seuls l’ammonium, les acides aminés (à l’exception d’un, la proline) et les peptides de petite taille peuvent être incorporés dans la cellule de la levure. On parle alors d’azote assimilable ou Yeast Assimilable Nitrogen (YAN).

  • Sels minéraux : Magnésium, Zinc, Potassium… Ils sont essentiels à la physiologie de la levure, et donc, à la performance de la fermentation.

  • Vitamines : acide pantothénique (vitamine B5), thiamine (vitamine B1)… Ils permettent une croissance optimale des levures et améliorent leur survie en condition de stress.

    L’oxygène est aussi indispensable pour réaliser la synthèse de facteurs de survie tels que les stérols et les acides gras insaturés qui jouent un rôle clé dans la structure de la membrane.

    Tous ces éléments sont présents dans le moût de raisin. Cependant, le choix du cépage et du porte-greffe, les conditions climatiques et pédologiques, ou encore la conduite du vignoble, peuvent fortement influer sur sa composition.

    Qu'est ce qu'un moût carencé ?

    La teneur en azote assimilable est le principal facteur limitant et un moût est considéré comme carencé à partir d’une quantité inférieure à 140 mg/L d’azote assimilable. Cette teneur peut néanmoins varier selon le degré d’alcool potentiel, la température, l’oxygène, la turbidité du moût et les besoins nutritifs de la levure.

    Les moûts sont plus rarement carencés en sels minéraux et vitamines. Leurs teneurs sont importantes mais difficiles à doser, et donc, rarement contrôlées.

    Quelles sont les conséquences d'un moût carencé ?

    Le manque de nutriment impacte la croissance et la viabilité de la levure avec des conséquences néfastes : risque de fermentations languissantes, arrêts de fermentation ou apparition d’arômes désagréables (odeurs soufrées, alcools supérieurs en grande quantité). Il est donc nécessaire d’anticiper ces risques en apportant des éléments nutritifs exogènes.

    2 - L'apport exogène d'éléments nutritifs

    Les 4 points clés d’une bonne gestion de la nutrition :

  • Déterminer son niveau de carence (en tenant compte de l’influence des facteurs précédemment cités),

  • Complémenter seulement si nécessaire,

  • Utiliser une nutrition appropriée,

  • Complémenter au bon moment.

Quel nutriment choisir ?

 

En cas de carence azotée, trois possibilités s’offrent au vinificateur selon la forme d’azote apportée :

-          Nutrition minérale (ou inorganique) : ion ammonium (NH4+) aussi appelé sel d’ammonium et azote ammoniacal

Il peut être apporté soit sous la forme de sulfate d’ammonium, soit de phosphate d’ammonium (ou phosphate diammonique DAP). Il peut aussi être trouvé combiné à la thiamine.

De synthèse chimique et peu coûteux, ce type d’apport peut être dommageable au bon déroulement de la fermentation. Assimilé trop rapidement par la levure, il favorise en effet leur multiplication  rapide et importante, les mettant dans une  situation de carence,  générant  une production d’arômes soufrés indésirables et d’acidité volatile. Un excès d’azote ammoniacal peut inhiber certains systèmes de transport et ainsi limiter l’entrée des précurseurs des thiols, entrainant une diminution du potentiel aromatique du vin.

-          Nutrition organique : 100% levures inactivées

Sources naturelles d’acides aminés, de minéraux, de vitamines et d’un coût supérieur, elles apportent tous les éléments nutritifs nécessaires et constitutifs de  la levure.

Cette nutrition est basée sur la qualité et la diversité des nutriments plutôt que sur la quantité des apports en comparaison avec la nutrition inorganique. Ainsi,  la cinétique de la fermentation alcoolique est plus régulière et l’expression aromatique des vins renforcée  .  

Le prix de ces levures inactivées, plus élevé que celui des sels d’ammonium, varie selon leur composition, elle-même déterminante dans l’efficacité de cette nutrition organique.

-          Nutrition complexe : mélange composé de levures inactivées, de sels d’ammonium, de thiamine

La formulation des nutriments complexes peut être très variable selon le fournisseur et par conséquent, les prix diffèrent. Ils assurent une nutrition équilibrée avec une assimilation plus progressive de l’azote. L’activité fermentaire est harmonieuse et améliore la consommation des sucres.L’azote est un facteur clé pour assurer le bon déroulement de la FA, mais il ne faut pas pour autant négliger les autres besoins  fondamentaux en oligo-éléments (vitamines, minéraux) et en facteurs de survie (stérols et oxygène). Tous ces nutriments sont disponibles dans les levures inactivées, composés de la nutrition organique et de la nutrition complexe.

 

Quand doit-on nourrir ses levures ?

 

Selon la quantité en azote assimilable du moût et le degré d’alcool potentiel, un ou deux apports sont recommandés. Si un seul apport est nécessaire, il doit être réalisé au 1/3 de la fermentation alcoolique pour favoriser l’activité levurienne et la consommation des sucres plutôt que la multiplication des levures. Si deux apports sont requis, le premier doit être effectué au début de la fermentation alcoolique, et le second au 1/3 de la fermentation. 

Les vinificateurs disposent donc d'une gamme complète pour la nutrition levurienne dont l’utilisation doit être raisonnée en fonction des problématiques de chacun. D’autres outils, comme les protecteurs , peuvent intervenir en complément et se révéler particulièrement efficace pour prévenir des difficultés fermentaires.

Plus d'informations sur l'auteur :

Lallemand Oenology
Lallemand OenologyCe membre est un influenceur Winemak-In
Producteur et développeur de levures, bactéries et dérivés de levures pour l'oenologie