Gel : un premier bilan catastrophique dans le vignoble
Publiée le 13/04/2021 14:59Retour sur un épisode de gel historique ayant touché près de 80% du vignoble français.
Les viticulteurs français vivent actuellement une période de gel historique de très grande ampleur qui rappelle malheureusement celle de 2017 et surtout 1956. Alors que les photographies de vignes réchauffées par les flammes ont fait le tour des réseaux sociaux, la beauté des images cache une bien triste réalité.
La nature peut être violente. Si cet épisode avait bien été prévu, son intensité a pris la profession de court. Le cycle végétatif, avancé à cause du redoux de ces derniers temps, a permis à la gelée de faire des ravages sur les cépages les plus précoces sur près de 80% du vignoble hexagonal.
Une semaine éprouvante dans le sud de la France
Dans les vignobles méridionaux, la Gironde ne cache pas sa détresse. Touchée très largement, elle déplore des dommages substantiels dans les Graves, le Sauternais, l’Entre-Deux-Mers et les Côtes. Même des parcelles d’habitude épargnées par ce phénomène ont été impactées. On parle ainsi de -6°C par endroits, des températures tombées si bas qu’aucune technique de lutte ne pourrait être réellement efficace. Sans dévoiler de chiffres précis, on sait déjà que 30 à 40% de la future récolte a été anéantie.
Idem pour le pourtour méditerranéen, où seuls quelques coteaux semblent avoir tiré leur épingle du jeu. De l’Hérault à la Provence, la superficie atteinte est large mais, surtout, les dégâts sur la plante sont très importants – 50 à 100%. Dans les IGP du Languedoc, on estime déjà une perte des deux tiers de la récolte, et en Corse ce coup de froid aurait engendré des pertes de 30 à 70% selon les régions. Même désolation en Vallée du Rhône où la totalité des Côtes du Rhône verra son rendement amputé.
Le pire encore à venir dans les vignobles septentrionaux
Après deux nuits extrêmement éprouvantes, les viticulteurs ne peuvent cependant pas encore souffler, notamment dans les vignobles du nord de l’hexagone. En Charentes, on craint le pire cette semaine. Une gelée blanche est présagée après des pluies qui auront apporté de l’humidité dans les vignes et une végétation encore un peu plus développée. Idem en Loire. Les dégâts, bien que visibles, restent hétérogènes mais l’inquiétude est de mise face aux conditions annoncées.
En Bourgogne, la plupart des chardonnays étaient au stade de feuilles étalées et ont payé le plus lourd tribut. La neige avait amené de l’humidité et, ici encore, la précocité du millésime a intensifié l’impact du gel. On comptabilise au moins 50% de dégâts. Coup dur pour les chardonnays en Champagne aussi, où la réserve interprofessionnelle devrait toutefois prendre le relais pour répondre à la demande. Seule lueur d’espoir, le vignoble alsacien dont la végétation moins avancée, en dehors de quelques parcelles précoces, a traversé cette épreuve sans trop de pertes.
Répercussion directe du dérèglement climatique avec lequel les viticulteurs doivent composer depuis quelques années, ce gel inédit est une nouvelle épreuve dans un contexte déjà particulier à cause de la crise économique et de la fermeture des restaurants. Parfois les feux ont été vains et n’ont pas réussi à contrer le froid. Des producteurs expliquent avoir perdu l’intégralité des bourgeons sortis. Dernière solution, miser sur le contre-bourgeon et une belle floraison mais ils restent moins fructifères. De plus, un dispositif d’aides est au cœur de toutes les discussions car la vigne n’est pas la seule culture concernée. Les arbres fruitiers ont été eux-aussi frappés de plein fouet. Face à cette situation exceptionnelle, le gouvernement va déployer le régime de calamité agricole.